- PLASTES
- PLASTESLes plastes sont des organites propres aux cellules des végétaux chlorophylliens, c’est-à-dire des Algues, des Bryophytes et des végétaux vasculaires ou végétaux supérieurs. Les chlorophylles, pigments de la photosynthèse, se trouvent exclusivement dans les plastes et sont généralement associées à des quantités variables de pigments caroténoïdes. D’après leur teneur en ces divers pigments, on distingue trois catégories de plastes: les chloroplastes (dont les pigments essentiels sont les chlorophylles), les chromoplastes (où dominent les pigments caroténoïdes, souvent au point de ne plus renfermer de chlorophylles) et les leucoplastes (dépourvus de pigments).Les chloroplastes permettent aux végétaux verts de capter l’énergie solaire et de la mettre en réserve sous forme d’adénosine-triphosphate (ATP), pourvoyeur de l’énergie chimique nécessaire aux biosynthèses et d’abord à la réduction de l’anhydride carbonique [cf. PHOTOSYNTHÈSE]. Par cette puissance de synthèse due aux chloroplastes, les végétaux verts sont, avec certaines bactéries, les seuls êtres vivants capables d’entretenir, par apports nouveaux, la quantité de substances organiques de la biosphère dont les végétaux sans chlorophylle et tous les animaux sont tributaires [cf. AUTOTROPHIE ET HÉTÉROTROPHIE]. De plus, il faut rappeler que la photosynthèse est le seul phénomène naturel producteur d’oxygène moléculaire. Il est probable que tout l’oxygène atmosphérique provient de la photosynthèse: c’est une autre raison de subordination de la vie animale au fonctionnement des végétaux autotrophes. Avec le secours de l’énergie solaire, les cellules à chloroplastes compensent la tendance universelle à l’augmentation de l’entropie du monde vivant.Les chloroplastesEn général, les chloroplastes se trouvent dans des cellules ou des tissus exposés à la lumière, mais on connaît quelques exceptions (graines de pins par exemple).MorphologieAssez uniformes chez les végétaux supérieurs, les chloroplastes sont morphologiquement très divers chez les Algues. Les chloroplastes des végétaux supérieurs ont le plus souvent une forme lenticulaire et leur plus grand diamètre est de l’ordre de 3 à 6 猪m. Leur épaisseur est voisine de 2 猪m. Les cellules chlorophylliennes en renferment un nombre apparemment indéterminé, parfois très élevé (cellules palissadiques des feuilles).Les chloroplastes peuvent être oblongs ou rubanés chez des Algues Phéophycées ou Rhodophycées, où ils se montrent aisément déformables. Au contraire, chez de nombreuses algues vertes, notamment dans le groupe des Conjugatophycées, ils ont des formes définies, souvent très spécifiques, et chaque cellule en contient un ou deux, selon les espèces: on les désigne alors par le terme de chromatophores. Par exemple, les Zygnema ont deux chromatophores étoilés par cellule, Ulothrix zonata renferme un chromatophore annulaire dans chacune des cellules du thalle filamenteux, tandis que le plaste est lamellaire chez les Mougeotia et réticulé chez les Œdogonium (cf. ALGUES).InfrastructuresDans les chloroplastes des végétaux supérieurs, la chlorophylle n’est pas uniformément disséminée. On peut voir, sur le vivant, des granules plus vivement colorés en vert dans le stroma des chloroplastes. Ces granules sont appelés «grana» ou «granums». La structure feuilletée des chloroplastes et des grana avait été décelée avant l’utilisation du microscope électronique. Grâce à cet instrument, on a pu préciser les infrastructures chloroplastiques. De très nombreuses études, dont certaines sont toujours en cours, ont permis de dégager des traits généraux et ont dévoilé une grande diversité de détails [cf. CELLULE].Les chloroplastes sont toujours limités par deux membranes plasmiques, d’environ 6 à 8 nm d’épaisseur, concentriques et distantes d’environ 10 nm. La membrane interne émet dans le stroma (fig. 1) des replis en forme de crêtes, rappelant celles des mitochondries. Ces replis sont toutefois rares dans les chloroplastes entièrement différenciés. Dans le stroma se trouvent surtout de nombreuses lamelles, partiellement associées en empilements compacts. Une analyse précise montre qu’il s’agit en réalité de saccules aplatis dont les profils sont plus ou moins longs et parfois discontinus. Ces saccules sont les «thylacoïdes» de Menke. Les plus étendus traversent le plaste de part en part, mais sont généralement des lames ajourées, ce qui se traduit par des interruptions dans les sections transversales ultrafines. D’autres thylacoïdes ont la forme de disques de dimensions plus restreintes. Chez les végétaux supérieurs, ces thylacoïdes ont ordinairement tendance à s’associer étroitement sur la totalité ou sur une partie de leurs surfaces latérales. Ils forment ainsi des empilements lamellaires grossièrement cylindriques, les grana, reliés entre eux par les thylacoïdes les plus étendus qui peuvent ainsi se trouver partiellement inclus dans plusieurs empilements granaires. On distingue donc, dans le stroma, des «zones granaires», où les membranes s’associent deux à deux (ces doublets sont les «partitions» de Weier et de ses collaborateurs), et des «zones intergranaires», où des portions de thylacoïdes demeurent isolées (les «frets» de Weier et coll.) [fig. 2].Les disques granaires résultent çà et là de replis partiels de thylacoïdes, de duplications marginales par invagination ou encore (ce n’est peut-être qu’un aspect du précédent mécanisme) de la bifurcation d’un thylacoïde intergranaire (fig. 1). W. Wehrmeyer interprète les empilements granaires comme les résultats d’une sorte de bourgeonnement marginal de thylacoïdes préexistants, accompagné d’une croissance dissymétrique provoquant l’arrangement en piles des thylacoïdes successifs. On considère maintenant comme très probable le fait que les cavités internes des divers thylacoïdes («loculi» de Weier et coll.) sont toutes en continuité les unes par rapport aux autres grâce aux isthmes des bourgeons, aux replis ou aux bifurcations. Le chloroplaste se composerait donc d’un espace intrathylacoïdal (peut-être en continuité avec l’espace intermembranaire périphérique) et d’un espace extrathylacoïdal occupé par le stroma.Appliquée aux chloroplastes, la technique d’imprégnation par l’iodure de zinc-tétroxyde d’osmium, qui permet, en créant des contrastes vigoureux et plus ou moins sélectifs, de préciser la topographie des divers compartiments cellulaires, appuie fortement l’idée d’un espace intrathylacoïdal continu (D. Marty, 1976) [fig. 3].La densité électronique du stroma est moyenne après les fixations osmiques seules et plus élevée après les fixations glutaraldéhydiques-osmiques, ce qui n’est pas le cas pour le stroma des mitochondries. Le stroma plastidal renferme, en plus des thylacoïdes et des crêtes, des globules lipidiques ou «plasto-globules» qui peuvent se charger de caroténoïdes dissous, et très souvent des grains d’amidon inclus dans une sorte d’enclave claire analogue à une vacuole, mais dépourvue de membrane limitante.Les sections fines de chloroplastes présentent çà et là des aires éclaircies contenant de très fines et très légères fibrilles, souvent en partie coagulées (ADN chloroplastique, cf. infra , Composition du stroma). Enfin, le stroma contient des granules osmiophiles de dimensions légèrement inférieures à celles des ribosomes cytoplasmiques des végétaux supérieurs; ce sont les plastoribosomes .La structure ainsi décrite est habituelle chez les végétaux supérieurs, mais n’est pas générale. Il existe de rares tissus de ces plantes qui ont des chloroplastes sans grana et c’est surtout le cas de la plupart des Algues. En fait de structures lamellaires, les chloroplastes dits «agranaires» renferment à peu près exclusivement de grands thylacoïdes, dont les profils sont parfois plus longs que le diamètre du plaste, auquel cas ils en suivent plus ou moins le contour. Ces thylacoïdes peuvent être associés par groupes de trois à plus de vingt, selon les espèces: ils forment alors des «grana géants» et le plaste ne montre pas de zones lamellaires intergranaires (Euglena , Nitella , Chlorella ...; fig. 4). Dans d’autres espèces, les thylacoïdes sont partiellement associés, certains passant isolément d’un groupe à un autre, mais sans que se réalisent d’empilements granaires caractérisés (Phéophycées). Enfin, d’autres Algues ont des thylacoïdes géants disséminés à l’état plus ou moins isolé dans le stroma (Xanthophycées, et surtout Rhodophycées; fig. 5). Les plastes des Rhodophycées possèdent, à la surface de leurs thylacoïdes, géants et isolés, un revêtement de granules d’environ 35 nm de diamètre, étroitement associés aux membranes thylacoïdales, les phycobilisomes (cf. infra , Constitution chimique générale).Les chloroplastes des Algues comportent par contre une structure qui ne se trouve pas chez les végétaux supérieurs: le pyrénoïde . C’est un granule protéique, plus dense que le stroma, qui peut être traversé par quelques thylacoïdes, dès lors modifiés et souvent tubulaires (fig. 4). C’est autour du pyrénoïde que la totalité ou la plupart des grains d’amidon sont concrétionnés. La structure fine des pyrénoïdes varie selon les groupes d’Algues: la plus simple se rencontre chez les Phéophycées et la plus complexe chez les Rhodophycées. Un même chloroplaste peut renfermer un ou plusieurs pyrénoïdes, selon les espèces.Une autre particularité structurale se trouve liée aux plastes des cellules chlorophylliennes mobiles, qui nagent dans le milieu aquatique (Flagellés, Volvocales, spores flagellées, gamètes). Le chloroplaste, s’il est unique, ou l’un des chloroplastes, s’ils sont multiples, porte une tache pigmentée, rouge intense, le stigma ou tache oculaire, qui détermine le phototactisme de ces cellules. Le stigma est constitué d’une ou de deux assises (rarement davantage) de granules lipidiques fortement chargés d’un pigment caroténoïde dissous. Ces granules, serrés côte à côte, forment une aire restreinte, située immédiatement au-dessous des deux membranes limitantes du plaste (fig. 6). Lorsqu’il existe deux ou plusieurs assises, elles sont généralement séparées par un thylacoïde. Un autre thylacoïde longe la face interne du stigma.Constitution chimique généraleDepuis de nombreuses années, on sait extraire les chloroplastes des tissus végétaux et on a réalisé à maintes reprises l’analyse qualitative et quantitative de tels organites. En dehors de l’eau, trois groupes de substances dominent quantitativement dans les chloroplastes: les protéines, les lipides et les chlorophylles. Les chloroplastes sont en outre riches en substances minérales. Une analyse de chloroplastes d’épinard donne par exemple les résultats suivants (C. L. Comar, 1942): protéines, 54 p. 100 du poids de matière sèche; lipides (surtout lipides complexes), 34 p. 100; chlorophylles, 5 p. 100; cendres, 7 p. 100.Parmi les divers types de chlorophylles, une seule est présente chez tous les Végétaux chlorophylliens, la chlorophylle a [cf. CHLOROPHYLLES]. La chlorophylle b se trouve dans les plastes des végétaux vasculaires, des bryophytes et des algues vertes. Les Phéophycées possèdent de la chlorophylle c (a + c ), les Rhodophycées associent les chlorophylles a et d , les Xanthophycées renferment les chlorophylles a et e .Les chloroplastes des végétaux supérieurs renferment en outre des pigments caroténoïdes dont le 廓-carotène et plusieurs de ses dérivés oxydrilés (xanthophylles notamment) sont les plus répandus. Chez les Algues Phéophycées (Algues brunes) les chlorophylles sont associées à un pigment caroténoïde «surnuméraire», la fucoxanthine . Les Rhodophycées (Algues rouges) possèdent d’autres pigments surnuméraires, de nature chromoprotéique, les phycobilines (phycocyanine et phycoérythrine) contenues dans les phycobilisomes.Les analyses de chloroplastes isolés, considérés in toto , décèlent en outre de nombreux constituants, dont l’étude physiologique [cf. PHOTOSYNTHÈSE] a révélé l’importance. Ce sont d’abord des transporteurs d’électrons tels que les cytochromes f et b 6 qui sont des protéines héminiques, la ferrédoxine, protéine non héminique mais renfermant du fer et du soufre, la plastocyanine, une plastoquinone (peut-être plusieurs) et d’autres transporteurs encore [cf. OXYDORÉDUCTIONS BIOLOGIQUES] dont l’ensemble constitue la chaîne photosynthétique . Il faut encore ajouter les accepteurs d’électrons et de protons, comme le NADP (nicotinamine-adénine-dinucléotide-phosphate), ainsi que l’ADP et l’ATP qui interviennent dans la photophosphorylation et le stockage de l’énergie lumineuse sous forme d’énergie chimique.Enfin, les chloroplastes renferment de l’acide désoxyribonucléique (ADN) et des acides ribonucléiques (ARN) [cf. infra , Composition du stroma].Composition biochimique des structures chloroplastiquesL’analyse des sous-fractions de chloroplastes, obtenues après éclatement par choc osmotique ou au moyen d’ultrasons et après centrifugations différentielles, permet de localiser les divers constituants en regard des infrastructures.Les membranes de l’enveloppe renferment 60 p. 100 de lipides et 40 p. 100 de protéines. Les premiers sont principalement des galactolipides, des phospholipides et des sulfolipides. Les protéines de ces membranes comportent des enzymes qui catalysent la synthèse des glycolipides précédents (galactosyl-transférases) et des transporteurs qui interviennent dans les échanges entre le stroma plastidal et le hyaloplasme.Les membranes des thylacoïdes sont analogues aux précédentes en ce qui concerne la nature des lipides (38 p. 100), les galactolipides formant la moitié environ du total. Les protéines (50 p. 100) sont en majorité hydrophobes; on peut distinguer: a ) celles qui sont associées aux chlorophylles; b ) celles de la chaîne des transporteurs d’électrons, mises en activité par l’énergie lumineuse; c ) l’ATPase qui assure le stockage d’une partie de cette énergie par phosphorylation.Les complexes chlorophylles-protéines possèdent nécessairement une architecture moléculaire définie, indispensable au fonctionnement des chlorophylles; elle n’est connue que fragmentairement. En outre, ces complexes sont associés entre eux et avec des lipides et à des caroténoïdes, de sorte que l’essentiel des pigments se trouve localisé dans des particules qui sont intégrées dans la membrane thylacoïdale. Ces particules peuvent être vues au microscope électronique avec la technique de cryofracture [cf. CYTOLOGIE].Les membranes thylacoïdales, comme celles de l’enveloppe des plastes, présentent la structure tripartite des membranes cytoplasmiques: une couche claire, hydrophobe, sépare deux couches osmiophiles et hydrophiles. La cryofracture clive ces membranes dans le plan médian de la couche claire, lorsqu’elle ne passe pas de part ou d’autre (schéma, fig. 7). Les répliques de ces cassures permettent, après ombrage métallique, d’observer quatre types de surfaces: 1. la surface de la membrane du thylacoïde située en regard du stroma du plaste; 2. la surface en regard de la lumière du thylacoïde (ou loculus ); 3. la surface de cassure conservant la demi-membrane située du côté du loculus ; 4. la surface conservant la demi-membrane située du côté du stroma. Enfin, les répliques 3 et 4 peuvent provenir soit de zones intergranaires (frets) soit de zones granaires (partitions) [cf. Infrastructures].Dans le cas de chloroplastes aux structures granaires hautement différenciées, on constate que les surfaces de cassure 3, issues de la demi-membrane qui se trouvait en contact avec les loculi, présentent des particules d’environ 16 nm de grand diamètre. Ces particules sont beaucoup plus nombreuses lorsque la fracture concerne une zone granaire (partition) que lorsqu’il s’agit de thylacoïde intergranaire, où elles peuvent manquer. Les surfaces de type 4, issues de la demi-membrane qui se situait du côté stromatique, ont retenu des particules plus petites (fig. 8), environ 8 nm, mais ces particules sont densément réparties à la fois dans les répliques de zones granaires et de zones intergranaires.La nature de ces particules a été précisée (fig. 9) à la suite des recherches biophysiques et biochimiques relatives aux réactions «lumineuses» de la photosynthèse qui ont conduit à distinguer les deux photosystèmes : PSI et PSII [cf. PHOTOSYNTHÈSE]. Le PSI contient de la chlorophylle a , des caroténoïdes, du cytochrome f , des protéines et des lipides; il comporte notamment un «centre réactionnel» dont l’essentiel est une molécule particulière de chlorophylle a (chlorophylle P700). Le PSII est constitué de chlorophylle a , de chlorophylle b , de caroténoïdes, de cytochrome b 6 et d’un centre réactionnel à chlorophylle a particulière (chlorophylle P680). Un faisceau d’arguments conduit à identifier les petites particules (face=F0019 力 8 nm) à des unités renfermant le PSI, et les grosses particules (face=F0019 力 16 nm) à des unités renfermant le PSII:– Plusieurs auteurs ont réalisé, à partir de chloroplastes d’épinard, des préparations de sous-unités enrichies soit en PSI, soit en PSII. Dans les premières, les petites particules sont en plus forte proportion, alors que, dans les secondes, ce sont les grandes particules qui sont prépondérantes (Arntzen et coll., 1969; Sane et coll., 1970; Sane et Park, 1971; Goodchild et Park, 1971).– Le PSI peut être décelé cytochimiquement par sa propriété d’oxyder la 3-3 diaminobenzidine (DAB) en un polymère opaque aux électrons et osmiophile, à la lumière exclusivement , tandis que le PSII réduit le TCNBT (thiocarbonitrobleu de tétrazolium) en donnant un précipité de formazan , lui aussi opaque aux électrons, osmiophile, et également à la lumière seulement.En illuminant des chloroplastes en présence de DAB ou de TCNBT, D. Marty (1976) a montré que le PSI est distribué dans la totalité des membranes thylacoïdales, alors que le PSII n’est présent, sensiblement, que dans les membranes granaires (fig. 9). Comme ci-dessus, la distribution des deux photosystèmes se superpose donc à celle des deux types de particules.– Sjolund et Smith (1974) comparent les répliques de cryofractures de chloroplastes cotylédonnaires de plantes saines et de plantes virosées de la crucifère Streptanthus tortuosus . Ils constatent que les sujets virosés, qui ne fixent pas de C2 et ne dégagent pas d’oxygène à la lumière, ce qui semble indiquer l’absence de PSII [cf. PHOTOSYNTHÈSE], forment des granums géants dépourvus de grosses particules (entre autres déficiences).On admet donc présentement que dans les membranes des thylacoïdes, l’essentiel des chlorophylles est contenu dans des particules complexes où les pigments sont associés à des protéines, à des lipides et à divers autres constituants qui réalisent des «antennes» collectrices de l’énergie lumineuse.L’adénosine triphosphatase (l’ATPase) chloroplastiqueLes membranes des thylacoïdes portent encore un élément structural de grande importance, le complexe de l’ATPase. L’organisation de l’ATPase chloroplastique rappelle celle des mitochondries. Les répliques de cryodécapage (fig. 7) passant par la surface des thylacoïdes en contact avec le stroma montrent des particules de 9 nm de diamètre, que l’on peut voir aussi sur des fragments de thylacoïdes préparés en coloration négative. Ces sphérules peuvent être détachées des thylacoïdes, par exemple par l’action de l’EDTA (acide éthylène-diamino-tétra-acétique), et sédimentées par centrifugation; elles constituent le «facteur de couplage» C1. Les thylacoïdes dont on a détaché le facteur C1 ne réalisent plus la phosphorylation de l’ADP en ATP à la lumière, mais leur fonction de photophosphorylation se rétablit si on leur restitue la suspension de ce facteur, dont les particules reprennent leur place à la surface de la membrane thylacoïdale. Sur le thylacoïde complet, les sphères C1 sont en effet portées par un court«pédicelle» qui lui-même se dégage d’une base hydrophobe ancrée dans la membrane (fig. 10).Composition du stromaLe gel stromatique fondamental renferme de nombreuses protéines, surtout de multiples enzymes, qui interviennent dans les réactions obscures de la photosynthèse, et diverses molécules organiques qui résultent de ces réactions: glucides solubles, acides organiques, acides aminés, nucléotides, etc., auxquels s’ajoutent des ions phosphate, inorganiques ou organiques (ADP, ATP).En outre, des constituants figurés, au moins à l’échelle de la microscopie électronique, sont noyés dans le fond stromatique. C’est le cas de l’ADN chloroplastique, constitué de molécules circulaires bicaténaires, à l’état non combiné et au nombre de 10 à 30 copies par chloroplaste. Cet ADN s’observe dans des éclaircies du stroma. Il code pour divers ARN, donc pour certaines protéines chloroplastiques. Une partie de ces ARN contribue à l’édification de plastoribosomes analogues à ceux des Procaryotes (coefficient de sédimentation voisin de 70 S), disséminés dans le stroma ou appliqués contre les membranes.La découverte de l’ADN chloroplastique (Ris et Plaut, 1962) soulève la question du degré d’autonomie des plastes dans les cellules végétales. Elle a remis en vogue la notion de «plastome» opposé au «génome». On peut dire, brièvement, que les plastes possèdent bien une sorte d’autonomie dans certaines de leurs biosynthèses (celle de l’ARN plastidal par exemple), mais que le développement des chloroplastes demeure largement sous le contrôle du noyau. Ainsi, les déterminants de la synthèse de chlorophylle a et, par voie de conséquence, de la construction des grana, sont des gènes nucléaires (D. von Wettstein).L’ADN chloroplastique se comporte cytologiquement comme l’ADN bactérien ou celui des Cyanophycées. De même que l’ADN mitochondrial [cf. CHONDRICHTHYENS] a remis en mémoire l’idée des symbiotes (P. Portier), l’ADN plastidal confère aux chloroplastes de frappantes ressemblances avec les Cyanophycées, dont le chromatoplasma rappelle le stroma plastidal avec ses lamelles chlorophylliennes. Aussi, l’idée, fatalement spéculative, d’une origine protocaryotique des chloroplastes a été envisagée, évoquant l’acquisition par des Cyanophytes autotrophes, qui étaient initialement libres, d’un parasitisme d’Eucaryotes ancestrales, devenu obligatoire.Enfin, ainsi que nous l’avons mentionné plus haut, les plastoglobules peuvent retenir en solution des pigments ou d’autres molécules telles que la plastoquinone. C’est aussi dans des sortes d’éclaircies du stroma, non limitées par une membrane, que sont concrétionnés des grains d’amidon chez de nombreux types de cellules chlorophylliennes.Les leucoplastesLes leucoplastes se trouvent principalement dans les tissus des végétaux chlorophylliens qui ne sont pas atteints par la lumière. Toutefois, de nombreux épidermes ne renferment que des leucoplastes. Ce sont des organites cytoplasmiques sans pigments, légèrement plus réfringents que le cytoplasme dont ils suivent les mouvements en se déformant constamment. Leur aspect rappelle, en plus grand, celui des mitochondries. Comme ces dernières, ils sont très fragiles et notamment très altérables par les fixateurs acides ou alcooliques. Ils n’ont pas de formes bien définies.À l’aide de la microscopie électronique, on les voit limités par deux membranes, comme les chloroplastes. La membrane interne émet dans le stroma des crêtes analogues à celles des mitochondries. Le stroma renferme généralement des globules lipidiques. Dans la plupart des espèces et des tissus, les leucoplastes accumulent des grains d’amidon disposés dans des enclaves du stroma comme chez les chloroplastes. Il est souvent possible de réaliser expérimentalement la transformation de leucoplastes en chloroplastes.Les chromoplastesLes chromoplastes sont caractérisés par leur richesse en pigments caroténoïdes (carotènes, xanthophylles...) qui peuvent subsister seuls ou masquer les chlorophylles. On les trouve surtout dans les pièces florales colorées en rouge clair ou en jaune, dans les fruits de ces mêmes couleurs, mais aussi dans certaines tiges, feuilles et même racines (carotte).Ils ont été longuement étudiés sur le vivant, notamment par A. Guilliermond qui en a distingué plusieurs catégories d’après l’état physique des pigments: diffus ou dissous dans des gouttelettes lipidiques (pétales de tulipe, baies d’asperge) cristallisés (carotte, tomate), fixés sur des structures fibrillaires (piment, pétale d’Amaryllis lutea ).La microscopie électronique a confirmé ces distinctions et a permis de retrouver les deux membranes limitantes, l’interne formant de rares crêtes, dans le stroma. Ce dernier est très appauvri dans les chromoplastes ayant achevé leur différenciation. Dans le type à pigments dissous (Ranunculus , A. Frey-Wyssling et E. Kreutzer; Spartium , A. Nougarède), le stroma s’est considérablement enrichi en globules lipidiques chargés du pigment (fig. 11). Dans le piment (Capsicum annuum ) se forment des aiguilles lipidoprotéiques qui paraissent fixer le carotène à leur surface et s’assemblent en faisceaux semi-rigides.La différenciation des chromoplastes est en général accompagnée du vieillissement de l’ensemble de la cellule. Les plastes eux-mêmes présentent des signes de dégénérescence. Cette évolution est précédée ordinairement d’une phase d’amylogenèse intense, puis l’amidon est hydrolysé et les pigments s’accumulent. Cette différenciation est, sauf exceptions très rares, irréversible.La différenciation des plastesLes chromoplastes résultent habituellement de la différenciation secondaire de chloroplastes ou de leucoplastes, alors que les chloroplastes et les leucoplastes proviennent typiquement de l’évolution directe de précurseurs présents dans les cellules des points de croissance (méristèmes), appelés proplastes (fig. 12). Ces derniers ont des dimensions, une infrastructure et des propriétés très voisines de celles des mitochondries. Ils présentent la même fragilité et s’altèrent de la même manière par «cavulation». Ils sont limités par deux membranes dont l’interne émet des crêtes dans le stroma. La différenciation en leucoplastes est relativement simple: le plaste s’accroît, ce qui le distingue de mieux en mieux des mitochondries; le stroma acquiert des globules lipidiques, très souvent des grains d’amidon, et les crêtes grandissent plus qu’elles ne se multiplient, contrairement à celles des mitochondries.La différenciation en chloroplastes est plus complexe et a suscité de nombreux travaux. En fait, le problème important n’est pas résolu: il s’agit du mécanisme de croissance des membranes qui formeront les thylacoïdes. Il est certain que, du moins au début, la membrane interne forme des crêtes qui s’allongent considérablement puis constituent les premiers thylacoïdes (fig. 13); cette même activité de la membrane interne peut aussi se traduire par une profusion de petites vésicules au lieu de crêtes. Ces vésicules s’assemblent fréquemment en une masse, parfois visible sur le vivant, successivement appelée «centre plastidal», «granum primaire» ou «corps prolamellaire». On peut voir, au microscope électronique, que, lorsque les structures des chloroplastes s’édifient normalement, ces vésicules confluent en thylacoïdes et le granum disparaît. On a cru pendant un certain temps que ce granum était doué de continuité génétique et se trouvait toujours dans les proplastes. On sait aujourd’hui que quelques espèces végétales en forment normalement, mais que, pour la plupart, le granum primaire n’apparaît que dans des conditions de déficience de lumière. On le trouve d’ailleurs régulièrement dans les plantes étiolées, et le reverdissement à la lumière le fait disparaître, tandis que les thylacoïdes s’édifient (fig. 14).Lorsque la différenciation est assez avancée, les rapports entre les thylacoïdes et la membrane interne deviennent très difficiles à préciser. La croissance des thylacoïdes et leurs ramifications ne sont peut-être plus dépendantes de cette membrane interne.La différenciation des chloroplastes est assortie d’une croissance considérable de ces organites. Cependant, le stroma semble avoir de moins en moins d’importance volumétrique, tandis que le système lamellaire se développe.Produits figurés de l’activité des plastesLes plastes peuvent accumuler des substances organiques inertes qui servent de produits de réserve. Le plus important d’entre eux est l’amidon , polyholoside dont on a déjà décrit la localisation dans le stroma. Les trois catégories de plastes peuvent en renfermer et par conséquent devenir des «amyloplastes». Dans les chloroplastes, l’amidon est un produit excédentaire de la photosynthèse. Il est généralement hydrolysé et les glucides résultants circulent vers les lieux d’utilisation ou de mise en réserve [cf. SÈVES]. Dans les leucoplastes, l’amidon est une réserve susceptible également d’être mobilisée: le fonctionnement de ces leuco-amyloplastes est parfaitement réversible (L. Emberger).Toutes les catégories de plastes peuvent aussi accumuler des protéines et devenir des protéoplastes. Les chloro- et les leucoprotéoplastes sont particulièrement fréquents dans certaines familles (Orchidacées). La protéine s’y trouve souvent cristallisée en bâtonnets aciculés qui déforment parfois le plaste (A. F. W. Schimper, 1885).Enfin, dans certains végétaux (Cactées, mais surtout Diatomées et Algues brunes), les chloroplastes s’enrichissent en lipides. Ils constituent de véritables oléoplastes, à ne pas confondre avec les inclusions de lipides cytoplasmiques, trop souvent nommées à tort oléoplastes ou élaïoplastes. Les Diatomées ont une importance quantitative et qualitative considérable dans le plancton océanique dont se nourrissent les poissons (cf. vie PÉLAGIQUE).
Encyclopédie Universelle. 2012.